La grande bouffe des plages, l’argent de Benco et les dialogues à la Audiard… Après le phénomène Camping 3, Franck Dubosc, le Brillat-Savarin des dîners sous la tente, s’est confié à Grand Seigneur pour un apéro laitier improvisé.
Hôtel de Bourrienne, Paris 10è. Sur les marches de la rédaction de Technikart et Grand Seigneur, le plus « bankable » des humoristes et des auteurs français pose en peignoir et savates, une énorme bouteille de lait entre les mains et une jolie demi-molle sous le survet’ (voir photo). Un hommage discret à Jeffrey Bridges dans le film des frères Coen The Big Lebowski et son célèbre White Russian (50 % Vodka, 20% Lait, 30% Khalua). Mais aussi aux packs de lait UHT, au quatre-quarts sous vide, aux Flamby à consommer avant la date de péremption, aux maquereaux au vin blanc, aux raviolis en boîtes, aux réchauds Butagaz… A tout ces festins de Champion qui font le charme des vacances populaires et de la gastronomie de plages. Des courses de garnison en début de séjour, un resto « habillé » la première semaine et le reste en salades (ou dans un cake aux yaourts) à la fin des vacances, la chorégraphie des casse-graines en familles n’a jamais été aussi bien écrite que par Franck Dubosc dans la saga des films Camping. Après l’incroyable succès du 3è volet cet été – et en attendant la sortie du DVD – cela méritait bien un petit verre de lait avec ce Ben Stiller à la mode de Rouen, Normand malgré lui qui n’a jamais mangé ni Teurgoule (riz au lait à la cannelle), ni Lisette de Dieppe (lire ci-dessous), mais salive d’amour devant les « Samboussek » de sa femme. Et rêve de tourner dans une comédie qui saurait enfin filmer la cuisine ! O.M.
Franck Dubosc, Camping 3 a fait plus de 3,3 millions d’entrées cet été et même Télérama a trouvé le film « très réussi »…
Franck Dubosc : C’est dingue. Peut-être que si autant de gens apprécient le film, c’est parce qu’on est revenu aux « fondamentaux » de la culture camping : les packs de lait, le Benco, le petit dej’, les bols sous la tente Maréchal, les boîtes de thon à la catalane, la gastronomie des Flots Bleus, quoi. Et puis, il faut dire aussi qu’à la différence du précédent (Camping 2), on n’était que deux à l’écrire avec Fabien Onteniente (le réalisateur). On connaît bien nos personnages, on allait dans le même sens…
C’est-à-dire ?
Quand on écrit à deux, ça créée beaucoup moins de compromis qu’à quatre comme sur Camping 2 (co-écrit avec Philippe Guillard et Emmanuel Booz). Et puis, c’était le bon moment pour prendre Fabien. Il sortait du film Turf avec Baer, Chabat, Depardieu, etc, qui n’était franchement pas un succès (23 millions d’euros de budget, seulement 400.000 entrées), il avait fait une belle chose à la télé dont il était content (La Dernière échappée avec Samuel Le Bihan, le téléfilm de France 2 sur Laurent Fignon). Bref, il était à cueillir : plus fragile, plus créatif.
Camping 3, c’est définitivement le film de Patrick Chirac ?
Oui, même si au début, je voulais justement l’inverse. Pour moi, un personnage – même principal – doit manquer un peu au public, ne surtout pas s’imposer. Quand on l’écrivait avec Fabien, on avait même prévu beaucoup plus de scènes sans Patrick Chirac. Et puis au montage, il est devenu évident que les moments les plus drôles, c’était avec lui…
Vous venez d’adapter pour M6 Les Beaux malaises, une série qui cartonne au Québec, bientôt diffusée en France… Ca vous a inspiré pour l’écriture de Camping 3 ?
Complètement ! Les dialogues de Martin Matte (le créateur de la série) sont d’une telle liberté que sur Camping 3 j’ai voulu des répliques plus modernes, moins dans un phrasé « à la Audiard ». Il faut avouer que sur les précédents, on avait parfois des formules toutes faites. Un côté « Tontons flingueurs des plages » qui marchait bien avec Brasseur, Lanvin ou Mathilde Seigner, mais que je ne trouvais plus assez ancré dans la réalité de 2016.
Comme l’expression « Te caille pas le lait Patrick ! » (Gérard Lanvin dans Camping 1) ?
Par exemple. Cette réplique – qui est quand même assez fantastique – je crois que c’est Gérard Lanvin qui nous l’avait refilé sur le tournage du premier volet. A l’époque, Gérard avait toujours un petit carnet sur lui dans lequel il notait toutes sortes de phrases entendues dans les bars quand il était avec Coluche. Une vraie mine d’or ! Il l’avait prêté à Fabien Onteniente, malheureusement il l’a perdu…
Qu’est ce que boit Patrick Chirac tous les matins avec son Benco : du lait ou du Régilait ?
Patrick Chirac ne fait jamais les choses à moitié, il boit du lait, évidemment ! Avec le Régilait, il y aurait presque une moitié de phrase inutile, c’est trop compliqué pour lui. Et en même temps, c’est vrai qu’on a envie de s’amuser à lui faire dire « Où est mon Régilait ? ». Il y a quelque chose qui sonne bien.
Depuis que Patrick Chirac fait la promo de Benco dans Camping, ça vous a rapporté gros ?
À moi, non ! Mais sur Camping 3, si les producteurs sont malins, ils ont dû bien gagner leur vie avec la marque. Il faut reconnaître que dans le film, le stock de Benco de Patrick Chirac est devenu carrément énorme. Fabien trouve que c’est le code, que ça fait « burlesque ».
Pourtant, vous êtes sur tous les pots de Benco au supermarché…
Oui, mais de dos. C’est si j’étais de face que je gagnerais quelque chose ! D’ailleurs pour l’anecdote, je crois que je n’ai jamais goûté de Benco de ma vie, ce sont mes fils (Raphaël et Milhan) qui en mangent. J’en ai des boîtes et des boîtes envoyées par le public. Depuis Camping 1, à chaque nouveau spectacle, je reçois toujours des boîtes de Benco en cadeaux, c’est systématique. Un jour en avion, alors que je partais en vacances à Bali avec ma femme, la chef d’escale m’a même fait appeler pour me remettre un énorme cadeau de la compagnie. Et devinez ce qu’il y avait à l’intérieur ? Du Benco…
ENTRETIEN OLIVIER MALNUIT ET LAURENCE REMILA
PHOTOS : THOMAS LAISNE
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