Faut-il sauver les bistrots?

 

Café du coin, Le Mans
Café du coin, Le Mans © Pierrick Bourgault

Chaque jour, il en ferme une vingtaine en France. Et pourtant, les Français les adorent… Comment la machine à remplacer les troquets par des coffee-shops peut-elle s’arrêter ? Nous sommes allés enquêter du côté de la buvette. Et franchement, c’est pas gagné.

Où sont passés les bistrots ? En 1960, ils étaient plus de 200 000 en France. On en compte à peine 35 000 aujourd’hui. Une chute de près de 80?% pour des lieux de vie dont beaucoup sont déterminants dans le choix d’un quartier, voire d’un appartement. Comment cette spécialité française du rade, du troquet, de la guinguette ou du bar-tabac, a-t-elle pu ainsi sombrer sans qu’on s’en rende compte ? La faute à Internet ? A l’interdiction de la clope ? Aux problèmes de terrasse ? A l’éparpillement des poivrots ? Ou aux bistrots eux-mêmes… Prestations dépassées, accueil aléatoire, contrats d’exclusivité, nouvelle concurrence des coffee-shops, les bistrots sont franchement mal partis, mais la résistance s’organise. Selon une étude récente de l’Observatoire du commerce indépendant, huit français sur dix restent viscéralement attachés aux cafés traditionnels et les préfèrent de loin aux établissements franchisés. Et pourtant, 6000 d’entre eux continuent de fermer leurs portes chaque année…

90 % n’ont pas le Wi-Fi
« Nous avons réussi à stopper l’hémorragie, se rassure Pierre Brunhes, sous-directeur du Commerce, de l’Artisanat et des Professions libérales au ministère de l’Economie. Depuis quelques années, le plancher de 35 000 cafés et bistrots ne bouge plus. » Des buvettes en sursis ? « Ça fait à peine quinze ans qu’on commence à se préoccuper du problème, corrige Bernard Boutboul, directeur de Gira Conseil, un cabinet d’études spécialisé dans la restauration. Pour un secteur aussi plébiscité par les Français, qui représente plus de 50 000 emplois et un chiffre d’affaires de 7 milliards d’euros, on peut se demander pourquoi tout le monde est aussi lent à réagir, à commencer par le gouvernement. » Il faut dire que par certains côtés, les bistrots semblent également creuser leur propre tombe : petit noir de mauvaise qualité et hors de prix, croissants aux abonnés absents dès 9h00 du matin, plat du jour cher, voire très cher, alors qu’il a été le plus souvent cuisiné chez un grossiste de l’agroalimentaire… L’addition est salée. En moins de quarante ans le bistrot et son jambon-beurre n’ont pas su contrer le développement hégémonique des chaînes de fast-food. Une nouvelle enseigne de sandwicherie comme, par exemple, Subway, peut ouvrir jusqu’à 50 nouveaux établissements par an. Mais 90% des troquets et brasseries n’ont toujours pas le Wi-Fi et 60?% d’entre eux ne vendaient même pas de Coca Light, il y a encore… quatre ans.

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